LA NATURE COMME DISCOURS: TRANSDISCIPLINARITÉ ET FONCTION DU NERF VAGUE
Susannah HAYS est une artiste photographe, éducatrice dans le champ de l’écologie, la photographie contemporaine et la philosophie et professeur à l’université de Californie, Berkeley (USA). La création d’images d’art qu’elle développe notamment depuis qu’elle a rejoint la Scott Nichols Gallery de San Francisco en 2000, puis au San Francisco Art Institute jusqu’en 2012 et dans de nombreuses autres galeries (comme la ‘Seager/Gray Gallery’ de Marin, California et la ‘Photo-Eye Gallery’ de Santa Fe, New Mexico), contribue à sa compréhension de la condition humaine. Champ de connaissance qu’elle a dispensé dans de nombreux séminaires intégrant la pratique de l’art, notamment visuel, des topologies spatiales, de l’écologie ou de la cognition incarnée. Elle travaille aujourd’hui en tant que consultante au ‘Intropy=Entropy Institute’ de San Francisco (California) et est membre du CIRET (Paris, France) et du CETRANS (São Paulo, Brésil). Suite à la publication récente dans ce cadre de « La Nature comme Discours: une Approche Co-Evolutionnaire à l’Art et au Design de l’Environnement » (Université de Californie, Berkeley, 2016) où elle a conduit un Ph.D interdisciplinaire, et de « Discours de la Nature : la Transdisciplinarité et le Fonctionnement du Nerf Vague » (Atlas, 2108), elle est entrée à l’Institut de Cape Cod du Dr Porges (Août 2019) afin de débattre de l’impératif biologique et moral des programmes des disciplines humanistes d’instiller les curricula indispensables à la transformation responsable de notre système nerveux autonome, actuellement somatiquement sous pression, afin que des énergies psychiques néocorticales, plus élevées et plus récentes du point de vue évolutif, puissent affiner et adapter notre potentiel humain (encore dormant, dans une large mesure). C’est le fruit de ce travail qu’elle nous présente pour Plastir dans cet article (et un prochain à venir) dont elle résume les perspectives ainsi: « Les qualités les plus raffinées de la conscience et de la perception humaine sont remises en question au sein de la définition d’évolution et Transformation Transdisciplinaire. Cet article dérive d’une philosophie de la nature et présente comme argument que le modèle triadique de la Transdisciplinarité ne réussira à atteindre les trois niveaux de Réalité prévus par l’Être Transdisciplinaire que dans la mesure où il parviendra à incorporer les forces autonomiques/cognitives inhérentes à l’organisation phylogénétique de l’Homo Sapiens. Étant donné que les principes co-évolutifs du fonctionnement du cerveau humain et du système nerveux autonome sont un impératif biologique pour élever les niveaux normatifs de l’Être, les individus, les écoles et les institutions culturelles devraient instiller dans leur curricula une compréhension phylogénétique et expérientielle de la neurobiologie humaine. Après une brève introduction historique à la métaphysique et au fonctionnement du nerf vague, l’auteure va mettre l’accent sur la perspective contemporaine de la Théorie Polyvagale et conclure que la nécessité intrinsèque de la Transdisciplinarité soit d’articuler la science (la voie de la nature) en relation avec le projet visant à ancrer l’éducation dans le sens primordial de l’Être Transdisciplinaire. »
UN ART EN BOUCHE ET EN CRI – ESSAI SUR LA REPRÉSENTATION DE LA FINITUDE EN BÉANCE
Christian RUBY, philosophe, chargé de cours à l’École supérieure d’Art et de Design (ESAD) TALM-Tours, membre du CA du FRAC Centre-Val de Loire et de la commission Recherche du Ministère de la Culture a écrit pour Plastir plusieurs articles dans le champ art & science, le dernier en date dans Plastir 56, 12/2019 abordait déjà le cri public dans un contexte sociopolitique. Il le remet ici en scène de manière épique, historique et artistique. S’en dégage un espace singulier où la thanatologie rencontre en permanence les cris de l’humain face à la mort. Plus encore, il tente dans cet essai de saisir la portée de ces cris projetés par les bouches, mais cette fois dans ses représentations artistiques, rendant ainsi compte d’un pan de l’histoire de notre rapport à la mort, au deuil et aux funérailles, complémentaire des études scientifiques. Pour l’auteur, la mort est en effet au centre de nombreuses traditions, mais aussi un ressort commun de liens sociaux et familiaux. Il s’interroge sur ce qui est désagréable dans la mort, et la resitue avec la douleur émotionnelle qui l’accompagne, dans l’histoire des arts, notamment depuis la Renaissance. Cette approche singulière et transhistorique nous projette dans les expressions les plus marquantes ‘des bouches en cri’ et de la finitude humaine avec les œuvres de David, de Leonard de Vinci, de Masaccio ou de Pierro della Francesca ou encore de Faulkner. A chaque fois, on plonge au cœur du signifié comme du signifiant avec la bouche contrainte et la bouche émancipée ou encore ‘en cri et béance’ suspendant la vertu. Christian Ruby tire de ces explorations polymorphes une analyse subtile des traits et mœurs proprement humains qui dépasse l’esthétique pour venir interroger nos représentations à l’interface entre la vie et la mort, entre la nature et la culture ou encore entre le corps et l’esprit.
SYMBOLISMES ET DIFFÉRENCES DU CHIFFRE 2
Bernard TROUDE est sociologue, PhD en Sciences de l’Art de Université Paris I et chercheur dans plusieurs laboratoires de l’université de la Sorbonne Descartes Paris V dont le CEAQ, ingénieur généraliste, professeur en sciences du Design et Esthétique industrielle, co-directeur de « Re-penser l’ordinaire ». Il publie régulièrement dans différentes revues comme Ganymède, Cahiers de l’idiotie (Montréal), Cahiers européens de l’imaginaire, Arts et Sciences, Plastir. Il a récemment rejoint le laboratoire Universitaire de Sciences Cognitives de San Francisco où il contribue à la Revue Médicale Généraliste de Normal (ville proche de Chicago, USA) qui rassemble toutes les éditions universitaires médicales, dont Ethic, Medecine & Public Health. Bernard Troude nous propose dans ce numéro le troisième volet de son étude sur la pensée du Deux dont le précédent « Quand le chiffre deux(2) est un aléa » était publié dans Plastir 55, 09/2019 et le premier dans Plastir 51, 09/2018. Sa perspective appuyée est que cette étude serve « à la compréhension de cette Intelligence Artificielle (I.A.) qui s’implante partout et que nous pensons ‘’REVOLUTION’’. Sur la question du ‘’DEUX’’ 2 : que devons-nous choisir entre le cerveau biologique et le cerveau virtuel ? L’ensemble numérisé n’est pas le verbe mais un signe assumant le caractère symbolique. 0 et 1 ont été préféré au groupe 1 et 2. Quelle différence y voyez-vous ? Quelle est donc cette différence ayant autorisé que ces termes (chiffres 0 et 1) en viennent ensuite à désigner des réalités que la logique du raisonnement nous laisse la possibilité d’en extraire un récit issu de nos imaginaires ? Nous revenons aux mêmes éléments sociologiques qu’au moment de la fin du siècle des lumières quand il a été question d’une forme de normalisation des mesures et qui ne s’est pas produite uniformément dans toute l’Europe. L’Allemagne par exemple ne place pas le 1 et le 2 dans le sens de la lecture de gauche à droite. Sens qui varie avec la langue de la région. En cela, tout chiffre est une inclusion dans un ensemble et invite à définir une place, le rang dévolu en fonction de son utilité et de son rôle, comprise dans une topologie. Ainsi, les quotités du ‘’ZERO’’ et du chiffre ‘’UN‘’– faisant partie d’un élément duel – sont soumises aux mêmes lois que toute la physique. Appelons cela intégration formelle des lois mathématiques dans tout processus d’observations et d’aboutissements formant conclusion. Les ordinateurs et les intelligences augmentées, les espaces de réponses virtuelles ont pris le pas sur toutes choses. L’I.A et les Data ont engendré les questions et obtenu de par le monde les réponses. Pour finir, la dichotomisation prévaut et fait se percevoir l’accolement entre la nature de l’ensemble – vue et esprit – et une technologie – raison et façon de faire – permettant qu’une activité à l’encontre d’un monde composé de quantités égales ou équivalentes exprime cette relation.
Cécile VOISSET est traductrice freelance, chercheur indépendant et membre associé du LIS (Lettres, Idées, Savoirs) à l’université Paris XII, membre de l’ATLF (Association des Traducteurs Littéraires de France). Elle a notamment publié : « Hobbes philosophe redoutable ? Des Amazones et des hommes ou le contrat selon Hobbes », L’Harmattan, Paris, Coll. Ouverture philosophique, 2008 ; « Guy Hocquenghem. La révolte (1946-1988) », Préface de R. Scherer, Paris : Ed. du sextant, 2015 ; « Identitary Order », Lambert Academic Publishing, 2017, Trad. de D. Fusaro, « Marx idéaliste. Essais hérétiques sur son matérialisme », Milan, Ed. Mimesis, coll. « Philosophie », 2019. Une fois n’est pas coutume pour Plastir, elle nous présente les œuvres de Vicken Parsons avant de nous faire pénétrer dans la respiration parsonienne elle-même qui s’exprime par la représentation d’un espace non préétabli mais construit aux moyens de la couleur séquentielle (mode généralement ternaire) et de la forme géométrique (carré, rectangle principalement). Comme nous l’explique Cécile Voisset, le trait épais du pinceau insuffle sa dynamique à un tout qui est intérieur, un intérieur ou dedans, où l’on circule sensiblement. La peinture de Vicken Parsons est l’occasion, entre autres, de penser la différence entre profondeur et perspective, et de poser à l’un des enjeux de l’art contemporain. Et l’auteur de nous le montrer avec un sens narratif aigu au travers de son prisme et de son ressenti, en différenciant foncièrement l’approche muséologique « où l’on apprend mais l’on ne crée pas (lieu des morts où l’on se forme d’eux et après eux) » de l’art comme process de la galerie qui « comme l’hier diffère de l’aujourd’hui, le naguère du contemporain ».