Catherine DOLTO, après des études théâtrales (École Jacques Lecoq où elle a notamment été l’élève d’Antoine Vitez, poète, metteur en scène, comédien et directeur de théâtre), sociologiques et un travail assidu auprès de sa mère, devient médecin. Sarencontre avec Frans Veldman, fondateur de l’haptonomie, dont elle suivra les enseignements dés 1980 sera déterminante dans sa future pratique de l’haptopsychothérapie auprès des adultes, des adolescents, des bébés et du monde de l’enfance. Elle est actuellement vice présidente du CIRDHFV (Centre International de Recherche et de Développement Haptonomique), dont elle fut une des fondatrices. Comme Veldman, elle adopte un point de vue phénoménologique où elle situe l’haptonomie comme la science de l’affectivité. Une science non duelle et au service de l’homme vu dans sa globalité. Elle est également auteur de très nombreux livres pour les jeunes. Raconte moi ma naissance– L’aventure de la naissance avec la PMA(avec Myriam Szejer), directrice de collection pour la jeunesseet auteur chez Gallimard jeunesse notamment la Coll. Mine de rien, Giboulées, 80 titres, créée avec l’éditrice Colline Faure-Poiré. Parmi ses publications, Paroles pour adolescents – livre à trois voix de Françoise Dolto, Catherine Dolto et Colette Percheminier (1988). Dico Ado– les mots de la vie – réunissant différents spécialistes, pédiatres, gynécologues, diététiciens, psychanalystes (Hors série Gallimard Jeunesse, 2001, Réédition 2017). Depuis 2010, elle poursuit un travail théâtral avec Emma la clown. Leurs spectacles : La conférence, Grand Symposium, Tout sur l’amour,Z’humains avec la complicité d’Hubert Reeves. Dans cet entretien exclusif pour PLASTIR, Catherine Dolto nous délivre un message fort, précis et qui appelle des prolongements. Pour elle, l’haptonomie,définie par son fondateur Frans Veldman comme science phénoménologique de l’affectivité, propose une approche occidentale, pragmatique et post freudienne de l’être humain dans sa globalité qui nous permet de sortir du dualisme corps esprit. L’Affectif réunit tout ce qui a trait aux émotions, sentiments, affects, perceptions et sensations. Frans Veldman en a décrit le fonctionnement et la phénoménalité. L’Affectif, grâce aux voies sous corticales et aux changements de tonus, organise sans cesse le nouage entre le corps et l’esprit. L’haptonomie propose une vision novatrice de l’intelligence et du développement et permet de revisiter le champ de la psychosomatique. Elle renouvelle toutes les pratiques du soin et de l’éducation au sens le plus large du terme, de la conception à la mort. Une de ses applications les plus connues est l’accompagnement haptonomique de la vie pré et post natale. Cette clinique entre en forte résonance avec l’épilepsie et la plasticité neuronale. Elle ouvre une réflexion sur les états dépressifs et propose une éthique de l’accueil des femmes enceintes et des tout petits.
Jean-Marc CHOMAZ est artiste physicien, directeur de recherche au CNRS, professeur à l’École polytechnique, directeur du Laboratoire d’excellence LaSIPS de l’université Paris Saclay et référent, avec Samuel Bianchini, de la Chaire Arts & Sciences de l’École polytechnique et de l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs (ENSAD) – PSL et de la Fondation Daniel et Nina Carasso. Il a fondé avec Patrick Huerre, le Laboratoire d’Hydrodynamique (LadHyX) et l’a codirigé de 1990 à 2013. Il a dirigé 28 thèses et coécrit 117 articles dans des revues internationales à comité de lecture. Il a reçu la médaille d’argent du CNRS 2005, le Grand Prix Ampère de l’Académie des Sciences 2012 et a été nommé Fellow de l’American Physical Society en 2001 et de l’EuroMech en 2018. Ses recherches portent sur la dynamique des films de savon, la biomécanique, la théorie de l’instabilité, l’éclatement tourbillonnaire, les fluides géophysiques, l’océanographie, le climat et l’Art & Science. En tant qu’artiste, il a notamment créé les installations Un chemin qui chemine et Time Trace, il cosigne avec le duo d’artistes HeHe le triptyque Fleur de Lys (2009) et Catastrophe domestique n°3, Planète Laboratoire (2012) et Absynth (2018), avec Anaïs Tondeur, l’exposition Lost in Fathoms (2014), avec Evelina Domnitch et Dmitry Gelfand, Luminiferous drift (2016) et EP=EPR (2017) avec Ana Rewakowicz et Camille Duprat, Through the looking mist (2014), Misty Way (2015), Le Néphélographe (2018) ainsi que l’installation-performance Transmutation de Base crée au Mexique en 2015 avec la chorégraphe Aniara Rodado. En 2005 avec Laurent Karst et François-Eudes Chanfrault, ils fondent le collectif d’artistes Labofactory dont les créations Infraespace, Fluxus, Wave, Moving Mind, Exoplanet, 2080, Infini, et l’exposition Aquaplanet (2015) side-event de la COP21 questionnent notre lien à l’environnement. La série issue de collaborations interdisciplinaires Espaces intangibles avec les installations Vortex Line, Sound Stream, Blackout et Soleil irrésolu, explorent des cosmos sensibles et ont été présentées à Paris, Bogota et Berlin entre 2017 et 2018. Jessy DESHAIS, illustratrice de cette correspondance sans lecteur entre la terre et la lune après une éruption solaire et une tentative d’ingénierie climatique, se définit comme artiste plasticienne et « trafiqueuse d’images ». Elle vit et travaille à Montreuil-sous-Bois en France. Vite fatiguée par les restrictions des « métiers », vogue d’île en île en quête d’abordage de nouvelles techniques et d’espaces inexplorés. Elle continue à jongler entre l’art et la commande se nourrissant les uns des autres. Illustration de presse, réalisation de films, graphisme, sculpture, photo, scénographie et installation fiction qui réunissent tous ces univers. Les neuf illustrations originales qu’elle nous livre ici sont annotées en bas à droite du numéro de la base d’observation où elles se trouvent. La forme carrée est pour l’artiste une fenêtre base observatoire « hublot », vision de scrutation de la sphère et parfois d’un monde intérieur. Plus d’infos et un regard sur ses œuvres sur le site de l’auteur : http://jessydeshais.fr/. Venons en à présent à N56u3N4A. Selon Jean-Marc Chomaz qui avait participé au PLASTIR Hors Série intitulé « Les plis de la mémoire » (12/2015), c’est une fable climatique visant à renouveler les récits du climat en changeant de paradigme et de point d’observation. Il constitue une fiction en forme de parabole élusive, un merveilleux de science spéculative, une correspondance sans lecteur entre la terre et la lune après une éruption solaire et une tentative d’ingénierie climatique, trois monologues. Cette fiction lunaire rappelle le songe, le roman posthume de Johanne Kepler dont le voyage vers Lavinia permettait de mettre en doute le modèle géo-centré par un changement de perspective, un dépaysement du lecteur. Ici la fable met en scène des humains aux prises avec les Titans, les éléments naturels hors de contrôle, ce soleil qui se métamorphose – crise d’éruption cataclysmique qui commence par des aurores boréales fantastiques sur toute la planète et affecte même la lune en levant des rivières de poussière – et l’hiver nucléaire des hommes. Ces lettres poèmes sans lecteur composent une histoire en noir et blanc avec cette base sur la face cachée (Subvolva chez Kepler) où l’angoisse de ne pas communiquer, mais aussi de ne jamais voir la Terre, monte crescendo et fait allusion au requière de Legato, voix des monolithes de 2001 l’Odyssée de l’espace de Kubrick, sorti il y a un demi siècle.
VOYAGE AUTOUR DE MES PLASTICITÉS MULTIPLES ↵
Catherine NYEKI est artiste plasticienne plurimédia et musicienne. Diplômée des Arts-Déco ENSAD de Paris en scénographie, elle a été professeur associé à l’ENS (Ecole Normale Supérieure de St-Cloud). Depuis 1998, elle se consacre à la création d’oeuvres interactives, films, dessins, installations, et créations sonores en relation avec la biologie, les botaniques parallèles, les hybridations corporelles… voici quelques titres de ses oeuvres : Micros univers, Mu Herbier, Motoo Viridis, Main Verte, H2-Zoo, Granular, INDY-Gène, Globulus, Mutamorphe, Lemna Luciola, Cellula, Mimetika, et récemment, les Mimariums dans lesquels elle propose une biologie vidéoplastique inspirée des processus du vivant…Résolument tournée vers une démarche Art et Science, elle a collaboré en 2009 avec Michel Gho (Directeur de recherche au CNRS) en biologie du développement. Ses travaux ont fait l’objet de nombreuses expositions, et conférences en France, et à l’étranger :Galerie Donguy(Paris), Ars Electronica (Linz), Vidéoformes (Clermont Ferrand), Festival Nemo (Paris), Gaité Lyrique (Paris), Le Cube (Paris), Show off (Espace Pierre Cardin – Paris), Cité des Sciences de la Villette (Paris), La Conciergerie (Paris), Biennale internationale Media art (Wroclaw-Roumanie), E-Art (Shanghai)… Parallèlement à ses recherches artistiques, elle intervient régulièrement à l’École de l’image GOBELINS et à l’Université Paris 8, au sein des Ateliers-Laboratoires Idefi-CreaTIC dans le cadre du département humanités numériques. Catherine Nyeki résume son voyage à la fois initiatique et plastique en ces termes : « Au cours des vingt dernières années, mon travail de plasticienne, musicienne plurimédia a évolué en un biotope polymorphe, sorte de «vivarium» composé de pièces interactives, de créations sonores, vidéos et installations mais aussi de dessins et d’écrits consignés dans de nombreux carnets. Une œuvre d’art numérique par définition n’est jamais unique; elle est potentiellement transformable à tout moment. Il est fascinant d’avoir accès à un tel «matériau plastique variable». Ma recherche, depuis le début, autour d’organismes proches du vivant aux lois physiques paradoxales, m’a amené à me rapprocher du monde des sciences de la vie. Une expérience avec un chercheur au CNRS en biologie du développement, il y a une dizaine d’années, m’a ouvert de nouvelles pistes et m’a confortée à poursuivre mes inspirations en relation avec les sciences. J’ai développé différentes œuvres,dont certaines « à ramifications », par prélèvement d’éléments souches suivant un processus proche du vivant qui a engendré au fil du temps des microscopes sensoriels, des laboratoires tactiles incubateurs d’imaginaire, des botaniques parallèles, des nano-évolutions, des strates transformables, des musiques élastiques, des sonorités multilingues, des cartes–partitions, des cellules souches vidéo, des plantes-animales.... À travers un voyage autour de mes plasticités multiples, je vous invite à partager mes questionnements récurrents. Qu’est-ce qu’on modèle et qui nous modèle ? Quelle est la place du hasard dans tout cela ? »
ASSURER LA RÉSILIENCE STRATÉGIQUE À TRAVERS LES MOTIFS HAÏKU ↵
Anthony JUDGE a longtemps été directeur de la communication et de la recherche à l’UIA (Union of International Associations), une structure qui décrit les organisations internationales, les problèmes qu’elles perçoivent et les stratégies interactives qu’elles préconisent en ligne (voir Encyclopedia of World Problems and Human Potentielou Annuaire des organisations internationales). Il continue de publier de nombreux articles et documents associés à la gouvernance, l’organisation des connaissances et des stratégies plus appropriées (https://www.laetusinpraesens.org). En 2007, il fonde l’Union des Associations Imaginables (Union of Imaginable Associations), puis imaginatives, pour répondre à la surcharge d’information et à la complexité croissante du monde à l’aide de logiciels multimédias interactifs tels que ceux que nous avons choisi de publier dans PLASTIR (PLASTIR 36, 09/2014 & PLASTIR 39, 06/2015) avec une nouvelle vision de la réalité. Anthony Judge explore dans cette nouvelle contribution le rôle des poèmes haïkus comme moyen de prédisposer l’esprit à un niveau supérieur de résilience stratégique en réponse aux menaces, en particulier lorsqu’une configuration de haïku définit une forme de langage de modèle. Une telle possibilité repose sur des attributs valorisés du haïku: l’incarnation de la transformation, la capacité à contenir plusieurs couches de sens qui peuvent être découvertes ou explorées et la capacité à agir comme un réceptacle de sens profond. En répondant au défi expérientiel du pur présent, les haïkus sont présentés comme pertinents dans toute stratégie nécessaire pour faire face aux défis urgents du moment – comme c’est typique des préoccupations des arts martiaux. Un lien est établi avec l’expérience personnelle de la mort, en contraste avec les attitudes faciles à l’égard de la mort d’autrui – en établissant la signification du sacrifice personnel honorable dans une cause supérieure. Le haïku fournit une modalité de communication pour une compréhension essentielle de la nature et de la qualité de la réalité expérientielle reconnue intuitivement au cœur des arts martiaux à travers la juxtaposition risquée de la vie et de la mort. Ceci indique l’opportunité dynamique du potentiel de transformation des modèles changeants dans de tels moments – l’immédiateté esthétique essentielle au changement de paradigme.