Frédérique LECERF est docteure en arts, enseignante, chercheure et commissaire d’exposition. Artiste plasticienne, vidéaste et performeure, elle vit et travaille entre Paris et Berneval le Grand (76). Elle a suivi ses études aux Beaux-Arts de Paris (ENSB-A), à l’Accademia delle belle Arti de Venise et à l’Université Paris 8 Saint-Denis-Vincennes. Elle a été chargée de cours à l’université Paris VIII de 1998 à 2013 et est chargée de cours de l’Université de Lorraine depuis 2005 et à Paris VII depuis 2017. Elle est intervenue dans de nombreuses écoles des beaux-arts, mais aussi pour des écoles de commerces à l’EDHEC-Lille, à l’ICN Nancy et pour la Formation-Drouot, également en Chine à Pékin pour l’école XDF.CN-Beijing School et à l’HIFA à Wuhan – Chine (Institut des beaux-arts du Hubei). Elle a enseigné à L’IESA-Paris (école des métiers de la culture et du marché de l’art) de 2012 à 2015 où elle a mené des projets d’exposition et de vente aux enchères avec les étudiants de Mastère. Elle a organisé des journées d’études, conférences et colloques (Collège des Bernardins, Centre Pompidou-Metz, Musée de la Chasse et de la Nature, Université de Wuhan, de Shanghai…) et a été curatrice de nombreuses expositions (Oh! Les beaux jours, Wonderland TV, Broadway, Station Stationnement Stationner, La Cure, La Chasse au Snark…). Elle est également à l’initiative et co-fondatrice du programme culturel art & environnement franco-chinois «Dans Quelle Vie Tu Monde(s)?» (DQVTM) . Elle a été en charge en 2014/2015, de la programmation des performances au Musée de la Chasse et de la Nature à Paris, et de la « Nuit européenne des musées » en 2015 et en 2017 dans ce même lieu. Dans cet essai magnifiquement illustré, elle nous mène au cœur d’un cours de l’or très particulier, en cela qu’il relève d’un parcours artistique et curatorial, d’une historicité parsemée de légendes et d’aventures engageant l’homme au plus haut degré, mais aussi d’une philosophie attenante à la valeur et la plasticité intrinsèque de cette matière précieuse. Plus précisément, Frédérique Lecerf nous résume son approche en affirmant que « tout discours sur l’or – notamment, lorsqu’il s’agit de l’or que manie l’art – est si profondément enraciné dans les légendes qui confèrent à cet élément des pouvoirs surnaturels qu’il parait échapper aux formes de la rationalité ordinaires. Mais l’or est-il autre chose que ce qu’en ont fait les civilisations humaines ? Auquel cas, Il semble vain d’espérer démystifier un objet dont sa mythologie constitue l’essence même. Tout au plus peut-on tenter de recueillir les éléments épars d’un tel récit ; à défaut de prétendre écrire une histoire de l’or (car cela reviendrait à écrire une histoire universelle), rassembler un certain nombre de données qui, relevant de la science ou de la fiction, définissent l’or plus encore qu’elles ne se rapportent à lui et constituent un préalable indispensable pour pénétrer plus avant la question de la présence et des usages de l’or dans l’art contemporain. »
LE RÉEL : ONTOLOGIE PLASTIQUE D’UN MONDE FLOTTANT ↵
Nicolas-Xavier FERRAND est historien de l’art. Il enseigne à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de la Ville et des Territoires de Marne-la-Vallée (ENSA) depuis 2015, après un passage à l’Université de Bourgogne et l’Université Paris-Est Créteil. Après avoir travaillé sur Piet Mondrian et Takashi Murakami, il a rédigé une thèse d’histoire de l’art contemporain sur « Bertrand Lavier et le rapport au réel » (Université de Bourgogne, 2014), mise en perspective historique du rapport au réel dans l’art au travers du travail de Bertrand Lavier et de ses références à Marcel Duchamp, Andy Warhol, à la postmodernité et à la philosophie nietzschéenne. Ses recherches portent sur les moyens de la formalisation du réel au travers des œuvres d’art, et sur ce que ces formalisations disent des aires culturelles dont elles sont issues. Nicolas-Xavier Ferrand est aussi critique d’art et écrit de nombreux textes sur différents artistes contemporains : Pierre Labat, Les Terres du silence, Ed. Interface, 2017 ; Passion(s), Ed. Galerie Duboys, Centre d’art sacré de Lille, 2017 ; Thierry Diers, Errance d’une écriture, Ed. Galerie Duboys, 2015 ; Thierry Diers, Hollow Men, Ed. Galerie Duboys, 2015. Il est aussi commissaire d’exposition : Exhumer les liens : Bénédicte Lacorre, Sylvain Leal, Mayssat Jaoudat, Galerie BS, 2017, Passion(s), Centre d’art sacré de Lille, 2017 ; Le Chant des Machines : Nicolas Delay & Matthieu Crimersmois, 2016. Une partie importante de son travail de commissariat et d’édition (« Techno-Myst », Horsd’œuvre n°37, Ed. Interface) porte sur la façon dont les pratiques contemporaines ouvrent une nouvelle définition du rapport entre réel et virtuel. Il résume son essai en ces termes : « La notion de réel est à n’en pas douter l’un des grands concepts clés de la pensée occidentale moderne. Elle constitue l’un des maitres-étalon de l’édification de toute chose, réflexion, action, par sa capacité à dire l’essence de l’existence. Pour autant, la notion elle-même n’a jamais véritablement vu son histoire proprement écrite, ni sa définition véritablement clarifiée. Inventée au XIIIe siècle par le théologien scolastique Jean Duns Scot, « la réalité », au départ créée pour parler des essences des choses, a pris différents visages : l’invention de la perspective, de l’imprimerie, la révolution copernicienne, les travaux de Descartes, Berkeley, Hume, Kant précisent tour à tour un réel objectif, possible, intrinsèque, inconnaissable. Cette possibilité plastique du réel, qui se confirme aussi bien dans la figuration artistique et littéraire que dans l’avancée considérable des sciences humaines et sociales tout au long des XIXe et XXe siècles, s’ossifie considérablement lors de la seconde moitié du siècle dernier et l’avènement de la postmodernité. La déroute des totalisations, la fin des « grands récits » mise en lumière par Adorno et Lyotard laissa l’être humain postmoderne dans un grand désarroi ontologique, avec comme dernière variable d’ajustement le principe d’efficacité. Si cette optique avait pour but honorable de le préserver de l’aveuglement face aux systèmes de pensée surplombants, la pratique de l’efficacité eut pour conséquence de réduire le réel à une ontologie technoscientifique dominée par le factuel, le concret et le chiffré. Pourtant, de nombreux travaux, de la philosophie de Markus Gabriel, l’anthropologie de Philippe Descola, ou les travaux plastiques de David Hockney et Bertrand Lavier, réfutent cette unicité du réel et proposent des visions beaucoup plus enrichies. Le présent article vise à remettre en perspective historique la notion de réel, et à proposer, à l’aune de ces récentes approches du terme, une augmentation et une redéfinition anthropologique du réel, qu’il s’agisse du renversement de la perspective occidentale, d’une révision du rapport trouble entre réel et fiction, ou réel et virtuel, et à appeler à la remultiplication des voix qui définissent le réel. »
L’INTELLIGENCE DU MOT « SOI » – PHÉNOMÉNOLOGIE D’UN CONCEPT FASCINANT ↵
Danielle BOUTET est professeur à l’université du Québec (UQAR) à Rimousky et membre du Centre international d’études et de recherches transdisciplinaires (CIRET). Elle est également compositeure de musique et artiste interdisciplinaire. Spécialiste de l’interdisciplinarité et des nouvelles pratiques artistiques, elle a en effet contribué à la création de programmes interdisciplinaires en arts aux États-Unis et au Canada, tant au sein d’institutions d’enseignement que du Conseil des arts du Canada. Ses recherches portent sur la phénoménologie de l’expérience artistique, sur le processus instauratif dans la création artistique et sur l’épistémologie artistique. Spécialiste de la recherche-création, elle s’intéresse de plus en plus aux fonctions de l’art dans le monde humain, particulièrement sa fonction d’augmentation de la conscience et du sentiment d’existence. Après voir publié dans Plastir 32, 09/2013 un article sur les arts, la poésie, la musique et le réductionnisme, elle présente dans ce numéro cette nouvelle approche captivante de la définition du soi en nous éclairant sur ses origines : « C’est une proposition à l’effet que les nouvelles technologies de l’information soient des techniques de soi qui m’a fait m’intéresser à la définition du Soi. Dans le contexte d’un colloque savant sur la question, j’étais inquiète que la création d’un avatar par un joueur en réseau par exemple, puisse être considérée comme une technique de soi, sans distinguer entre « identité », « moi » et « soi ». Le colloque regroupait surtout des philosophes, dont Michel Foucault était la principale référence — ce qui peut être étonnant si on pense, par exemple, que la psychologie, notamment archétypale, jungienne et transpersonnelle, a une relation au concept de Soi beaucoup plus importante que la philosophie; et le définit complètement différemment. Comprenant que ces deux visions du Soi sont profondément irréconciliables, j’ai voulu regarder par moi-même. Le résultat est mi-sérieux mi-poétique, mi-rigoureux mi-esthétique — mais ce qui en est ressorti est quand même édifiant. Bonne lecture ! ».The neutral
Bruno TRAVERSI est docteur en philosophie de l’université Paris Ouest Nanterre et diplômé de l’Aikikai de Tokyo. Il est chercheur associé au laboratoire TEC (Techniques et Enjeux du corps) Université Paris Descartes, et à la SFPA (Société Française de psychologie Analytique). Il fait également parti du groupe des jeunes chercheurs du CND (Centre National de Danse) de Paris Pantin. Parmi ses axes de recherche, l’histoire et la philosophie des pratiques Extrême-orientales (aikido, yoga, danses kagura (plus ancienne danse japonaise de type extatique), et danses contemporaines comme le buto et l’étude des relations entre corps et inconscient à travers ces pratiques corporelles et les travaux de Wolfgang Pauli (Prix Nobel de physique en 1945) et de Carl Gustav Jung autour du « problème psychophysique » (de 1932 à 1958) qui proposent une interprétation de la culture extrême-orientale traditionnelle. Parmi des publications récentes sur le sujet: Le corps inconscient et l’Âme du monde selon C.G. Jung et W. Pauli, Ed. L’Harmattan, Collection Ouverture philosophique (2016) et avec Alexandre Mercier : Entre physique quantique et psychologie des profondeurs – volume 1 : La chose, l’espace et le temps, Éditions du Cénacle de France (2017) et L’arrière-monde ou l’inconscient neutre, Éditions du Cénacle de France (2018). Après avoir publié dans PLASTIR 42, 06/2016, « La déchirure de l’espace et la naissance du sujet – selon C.G. Jung et W. Pauli », il nous propose ici une approche inédite de l’inconscient neutre qu’il résume en ces termes : « De 1932 à 1958, Carl Gustav Jung et Wolfgang Pauli collaborent pour saisir l’unité sous-jacente de la matière et de l’esprit. Selon eux, l’inconscient ne serait pas seulement psychique, mais aussi physique, ou plus exactement « neutre », c’est-à-dire au-delà de la distinction entre physique et psychique. La genèse du concept de neutre s’élabore progressivement au fil de l’introspection que mène Pauli sous la direction de Jung, contre les préjugés, malgré les résistances intellectuelles des deux savants. Progression intellectuelle et cheminement psychologique, chez l’un et l’autre, se conditionnent mutuellement : le dialogue apparait comme une force de dépassement et de découverte, de progression vers une « nouvelle science » des choses neutres, au-delà du clivage entre la psychologie et la physique ».